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Une trentaine de sites du patrimoine national ont été touchés par la catastrophe. Grâce à une documentation détaillée, leur reconstruction ne fait pas de doute, mais celle du patrimoine du quotidien suscite plus d’inquiétudes.
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Séisme au Maroc : un mois après, le pays évalue les dégâts sur son patrimoine
Après avoir recensé les monuments affectés, les experts marocains examinent désormais plus finement les édifices touchés par le séisme du 8 septembre. Ici, plus d’une semaine après le drame, une vue du minaret de la mosquée Kharbouch en grande partie détruit à Marrakech.
AMMAR AWAD/REUTERS
La mosquée de Tinmel et son interminable enfilade d’arcades, prodigieux emblème du rayonnement de la dynastie almohade édifié au XIIe siècle ? « Un champ de ruines, hélas », regrette l’architecte marocaine Salima Naji, de retour de la zone de l’épicentre du séisme qui, dans la nuit du dimanche 8 au lundi 9 septembre, a fait plus de 3 000 morts au Maroc.
Le ksar Aït-Ben-Haddou, ensemble d’habitations en terre protégé de hautes murailles ? Fissuré. Quant au grenier collectif qui surplombe le village, il est tout simplement détruit. Les portes Taghzout et Bab Agnaou, incrustées dans les remparts de la vieille ville de Marrakech ? À terre.
La liste pourrait se poursuivre… Au total, le séisme a endommagé près d’une trentaine de sites du patrimoine marocain, en grande partie dans les régions de Marrakech, Taroudant, Ouarzazate et Tinghir. Un mois tout juste après la catastrophe, l’étape du décompte est franchie. « Dès le 9 septembre, les professionnels marocains de la culture et du patrimoine ont mis en place un dispositif de recensement des destructions », se félicite une source à l’Unesco.
« Nous en sommes maintenant à la phase des diagnostics », explique l’architecte Karim Rouissi, membre du Conseil international des monuments et des sites (Icomos), ONG qui réunit des experts de la conservation et de la protection du patrimoine. L’heure est à l’exploration précise des destructions.
« Des études sont menées en laboratoire, avec des auscultations dynamiques pour comprendre l’état des structures, la profondeur des fissures… », poursuit Karim Rouissi. Du résultat de ces évaluations dépend les orientations de la reconstruction et son budget. « Chaque bâtiment exige une approche différenciée », ajoute l’architecte.
Parmi les rares projets de reconstruction déjà détaillés, celui des musées du patrimoine immatériel, des confluences ainsi que du tissage et des tapis, à Marrakech, endommagés à des degrés divers. La Fondation nationale des musées, qui gère les trois sites, doit bénéficier d’un financement de 1,15 million d’euros de l’Aliph (Alliance internationale pour la protection du patrimoine dans les zones en conflit), dont près d’un tiers a déjà été versé.
Le monde du patrimoine ne nourrit toutefois pas d’inquiétudes pour l’avenir des monuments touchés. « La plupart ont déjà fait l’objet par le passé d’une documentation importante, qui comprend par exemple des plans détaillés ou la liste des matériaux utilisés, explique notre source à l’Unesco. Ce n’est pas comme à Mossoul, où certains bâtiments n’avaient pas encore été étudiés avant leur destruction par Daesh. Cela permettra de gagner un temps précieux pour reconstruire. »
Cette connaissance précise tient à « l’expertise solide du Maroc en architecture du patrimoine, en conduite de travaux de restauration, en gestion, en entretien des sites… » Ce savoir détaillé concerne bien sûr les sites classés au patrimoine mondial : le ksar Aït-Ben-Haddou et la médina de Marrakech, où la mosquée Koutoubia, les tombeaux saadiens et le palais El-Badi ont notamment été touchés. « Le patrimoine national va se relever, c’est une histoire d’orgueil national », assure Karim Roussi.
Mais il y a aussi le patrimoine moins visible. « Ce qui me préoccupe, c’est le “petit patrimoine” », confie Salima Naji. Tous les ouvrages autour de l’eau, un pont, une mosquée de village… » Des éléments d’architecture vernaculaire « peu connus, qui sont des biens communs constitutifs de l’identité collective » et dont la reconstruction présente un double risque, prévient-elle : « les folkloriser et perdre le génie climatique de ces bâtiments séculaires ».
À ses yeux, il faudra s’appuyer sur les compétences locales et employer des matériaux comme la pierre, le bois et la terre crue, autorisée par la réglementation parasismique. « Ces dispositifs résistent aux chocs et sont réparables rapidement par les habitants comme ils le font depuis des millénaires, argumente Salima Naji, ce qui n’est pas le cas du béton, jetable mais aussi inadapté aux variations de température, importantes dans ces montagnes. »
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