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Maroc, Libye… l'"ingérence humanitaire" occidentale en question – France Inter

Maroc, Libye… l'”ingérence humanitaire” occidentale en question
Un séisme meurtrier au Maroc, des inondations catastrophiques en Libye… Ces deux désastres dans deux pays de la rive sud de la Méditerranée ont suscité une réelle émotion ; et réveillé un vieux débat : celui de l’aide humanitaire.
Hier, la France a dépêché par avions militaires un hôpital de campagne avec 50 personnes dans la région de Derna, sur la côte de la Libye. C’est là que s’est déroulée la tragédie faisant des milliers de victimes. Cette structure médicale est la bienvenue dans un pays sans État unifié, déstabilisé depuis plus de dix ans.
En début de semaine, la France était prête à envoyer des sauveteurs de la sécurité civile, avec leurs chiens et leur matériel, dans la région du séisme marocain, comme elle l’a fait à d’autres occasions ; en Turquie cette année par exemple. Mais le feu vert marocain n’est jamais venu, les sauveteurs sont restés en France. Même chose côté américain.
Ce contraste entre ces deux situations soulève bien des questions, au-delà de toute polémique car le sujet ne s’y prête pas. Dans une vidéo adressée au peuple marocain postée sur les réseaux sociaux, Emmanuel Macron a lui-même évoqué des « polémiques qui n’ont pas lieu d’être » ; mais sa démarche de communication directe montre que tout ne s’est pas passé comme Paris l’espérait.
Parmi ces questions, il y a bien sûr la nature de l’aide humanitaire d’État. Personne ne doit être surpris qu’elle constitue un enjeu politique, elle l’a toujours été… La première intervention humanitaire française remonte à … Napoléon III : en 1860, Paris envoie l’armée française au Liban pour sauver les Chrétiens menacés, officiellement pour des raisons strictement humanitaires. Il s’agit évidemment de renforcer l’influence française face à l’empire ottoman. « Devoir d’intervenir », un livre de l’historien Yann Bouyrat (éd. Vendémiaire, 2013), consacré à cette expédition au Levant, relève à quel point les débats de 1860 ressemblent à ceux de la période contemporaine.
Depuis la fin de la guerre froide, des concepts comme le « droit » et même le « devoir d’ingérence », ont été agités et codifiés, dans l’euphorie de la fin des blocs. Ce que le refus du Maroc d’accueillir des sauveteurs français signifie, c’est que cette époque est terminée. Rabat a sifflé le retour de la souveraineté, même en cas d’extrême urgence.
A l’opposé, la Libye montre que cette « ingérence humanitaire » dont le monde occidental s’est progressivement fait l’avocat, reste légitime lorsque les États sont en faillite. C’est hélas le cas de la Libye – et l’aide française est d’autant plus bienvenue que la France a une grande responsabilité dans le chaos libyen, pour avoir pris l’initiative de l’intervention militaire de 2011 contre le régime du colonel Kadhafi.
Au XX° siècle, souligne dans un livre ancien (« L’action humanitaire », éd. Flammarion, 1995) Rony Brauman, l’un des penseurs français de cette discipline, « l’action humanitaire s’est affirmée comme composante des relations internationales et instrument diplomatique, en même temps qu’engagement individuel et mode d’accès privilégié au monde ».
L’expression de souveraineté des pays du Sud à laquelle on assiste change la donne. Le drame serait qu’au nom de cette affirmation nationale, les victimes des tragédies soient privées d’aide lorsque celle-ci n’est pas disponible localement. Le risque est que la solidarité recule dans un monde qui en a, au contraire, encore plus besoin.

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