Pourquoi l’Algérie fait la chasse à la langue française dans les écoles – RMC
En Algérie, les autorités se lancent, en cette rentrée scolaire, dans une chasse à l’enseignement du français. Le ministère algérien de l’Education nationale a en effet décidé de faire strictement appliquer la loi qui prévoit l’enseignement en arabe et en arabe seulement.
Cela ne concerne pas les établissements publics où, depuis longtemps, l’enseignement est en arabe. Mais les écoles privées qui, pour la plupart, pratiquent le double programme qui permet de préparer à la fois les examens algériens et les examens français comme le bac ou le brevet.
Ces écoles privées devront désormais appliquer le programme officiel et n’utiliser que les manuels autorisés, en arabe. Des inspections surprises ont déjà lieu pour vérifier que les élèves utilisent bien les manuels du programme national et des directeurs d’écoles privées sont convoqués au ministère pour s’engager par écrit à ne plus suivre les programmes français.
C’est une enquête du Figaro qui révèle cette nouvelle politique de “chasse au français” qui a des conséquences très concrètes. Des écoles bilingues ont dû fermer leur porte. Les élèves se retrouvent à la maison, déscolarisés. Le Figaro cite une mère d’une adolescente de 15 ans qui a fait toute ses études en français et qui n’a pas le niveau pour pouvoir poursuivre en arabe… 22 écoles qui avaient reçu un label du ministère français de l’éducation ont été sommées de renoncer à ce label sous peine de poursuite pénale…
D’autres mesures sont prises pour compliquer la vie de ceux qui veulent étudier en français. L’accès aux universités sera plus difficile pour les étudiants algériens titulaires d’un bac français. Et puis, les épreuves du bac, pour ceux qui se présentent en candidat libre, ne seront plus organisées au lycée français d’Alger. Les élèves devront aller passer les épreuves à l’étranger.
En Algérie, il n’y a qu’un lycée français, alors qu’il y en a par exemple 37 au Maroc. C’est le lycée Alexandre Dumas, qui accueille environ 2.000 élèves avec deux annexes en province. Il y a, tous les ans, environ 60 demandes pour une place. Les ministres, les hauts fonctionnaires, les apparatchiks du régime, se battent pour y inscrire leurs enfants, y compris ceux qui officiellement veulent faire reculer l’enseignement en français…
Toutes ces mesures devraient entraîner un recul de la pratique du français. Aujourd’hui, 15 millions d’Algériens parlent français, soit un tiers de la population. Cela en fait le troisième pays francophone du monde derrière la France et la République démocratique du Congo. Mais cela ne devrait pas durer. Déjà, le français, considéré comme la langue des colons, n’est quasiment plus enseigné dans le public en Algérie, alors que l’anglais est devenu obligatoire dès la fin du primaire.
Et lorsque le français n’est plus enseigné, il peut très vite disparaître. Cela s’est passé au Rwanda, qui en moins de 30 ans est devenu un pays anglophone alors que c’était une ancienne colonie belge où presque tout le monde parlait français. C’est fini. Même chose au Liban, qui reste officiellement un pays francophone, mais sur Facebook, on trouve huit publications en anglais pour une en français… La pratique du français a également presque disparu dans des pays comme le Vietnam ou le Cambodge.
Pourtant, au niveau mondial, la francophonie continue de progresser. Le français est aujourd’hui la cinquième langue du monde derrière l’anglais, le chinois, l’hindi et l’espagnol. Mais dans les 20 ans qui viennent, le français dépassera l’espagnol, essentiellement en raison de l’explosion démographique en Afrique. On pourrait passer de 300 millions de francophones aujourd’hui à 700 millions dans 20 ans. Le français est donc loin d’être une langue qui décline. Sauf sans doute en Algérie…
"Un moment historique": Emmanuel Macron propose "une autonomie à la Corse"
© Copyright 2006-2023 BFMTV.com. Tous droits réservés. Site édité par NextInteractive
