Déperdition scolaire et travail des enfants : comment briser le cercle vicieux – Le Matin
Yousra Amrani,
Beaucoup d’efforts ont été fournis en matière de lutte contre la déperdition scolaire et le travail des enfants. Mais malgré les réalisations, les deux phénomènes semblent avoir la peau dure, d’où l’importance de mutualiser les efforts et de faire preuve d’ingéniosité pour trouver des solutions efficaces. Comment donc renforcer les actions publiques et celles de la société ? Telle est la question à laquelle a tenté de répondre une pléiade de responsables et d’experts dans le cadre d’une conférence-débat organisée par la Fondation Lafqih Titouani.
Le décrochage scolaire constitue un vrai défi pour le système éducatif, en raison de ses répercussions négatives sur les élèves décrocheurs et son coût social et économique pour le pays. Ce phénomène reste d’ailleurs intimement lié au travail des enfants.
>>Lire aussi : Décrochage scolaire : un casse-tête pour le ministère de l’Éducation nationale
En effet, de nombreuses études nationales ont démontré la corrélation entre les deux phénomènes dans la mesure où une grande partie des enfants qui abandonnent les bancs de l’école finissent par intégrer prématurément le marché du travail. C’est justement pour identifier les moyens à même de permettre de lutter contre ce phénomène que la Fondation Lafqih Titouani a organisé, vendredi dernier à Khémisset, une conférence-débat sous le thème «Lutte contre l’abandon scolaire et le travail des enfants, une responsabilité collective». Cette rencontre a constitué ainsi une occasion pour évaluer d’abord les réalisations dans le domaine de la lutte contre le travail des enfants ainsi que dans la lutte contre le décrochage scolaire, avant d’examiner les moyens à déployer pour venir à bout des deux fléaux.
À cette occasion, le chef du service chargé de la législation au niveau du ministère de l'Inclusion économique, de la petite entreprise, de l'emploi et des compétences (MIEPEEC), Saïd Sadrati, a mis en exergue les efforts engagés par le Maroc pour lutter contre le travail des enfants, à commencer par la ratification par le Royaume de deux conventions internationales. Il s’agit de la convention 138 de l'OIT (Organisation internationale du travail) qui interdit le travail des enfants de moins de 15 ans et de la convention 182 qui interdit les pires formes d'emploi pour les mineurs âgés de 15 à 18 ans, en passant par la mise en place d’une stratégie nationale de lutte contre ce phénomène en 2014. Cette stratégie a permis de ramener le nombre des enfants travailleurs actuellement au Maroc à 19.000 au lieu de 515.000 enfants recensés en 1990.
Le même responsable a toutefois estimé que ces réalisations ne doivent pas masquer les objectifs tracés par le Royaume, à savoir une éradication totale du phénomène du travail des enfants et celui de l’abandon scolaire, d’où l’importance de traiter les causes à l’origine des deux phénomènes, à savoir la pauvreté, le manque de conscience des parents de l’importance de l’éducation et des risques du travail précoce sur la santé physique et mentale des enfants, ainsi que la migration vers les villes.
Un avis soutenu par les différents intervenants qui ont plaidé en chœur pour la mise en place d’une stratégie globale et intégrée pour la lutte contre la déperdition scolaire et lutter contre le travail des enfants qui englobe tous les partenaires étatiques ainsi que la société civile. «Aujourd’hui, il existe un plan national de lutte contre le décrochage scolaire qui prévoit plusieurs actions, notamment la création d’écoles communautaires, la mise en place d’internats, l’élaboration de programmes de soutien scolaire pour soutenir les élèves souffrant d’échec scolaire. Le ministère œuvre par ailleurs, en collaboration avec plusieurs partenaires, notamment le ministère de l’Intérieur à travers l’Initiative nationale pour le développement humain et le programme de réduction des disparités spatiales, mais il faudra coordonner davantage les actions entre les différents départements», a souligné, pour sa part, le directeur provincial relevant du ministère de l’Éducation nationale, Khalid Azeroual.
Les intervenants ont par ailleurs souligné l’importance de renforcer les activités parascolaires proposées aux élèves, particulièrement dans le monde rural qui souffre de l’absence de maisons de jeunes et d’espaces ludiques de jeux et de sports. Sur ce point, Hicham Makhoun, directeur provincial relevant du secteur des jeunes à Khémisset a appelé à l’ouverture des espaces existants dans les internats «Dar Talib» situés dans le monde rural pour accueillir des activités parascolaires ainsi que la mise en place de colonies de vacances de proximité.
Il convient de rappeler que le ministère de l’Éducation nationale a mis en place une batterie de mesures pour lutter contre l’abandon scolaire. Ces efforts ont permis de réintégrer environ 65.944 élèves sur les 334.000 ayant abandonné les bancs de l’école au cours de l’année scolaire 2022-2023, ce qui a relativement réduit le taux d’abandon scolaire cette année.
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