La criminalité au Maroc : état des lieux, chiffres et solutions – Menara.ma
Brahim Charafi hercheur Universitaire, Paris
Est-ce fatale de vivre avec ce phénomène ?
Qui au Maroc n’a pas un jour assisté ou lu ou entendu des agressions en plein jour, des jets de pierres sur autoroute, des vols à mains armée, violence domestique, cybercriminalité, terrorisme, corruption, délinquance juvénile… ?
L’ampleur de ces actes demeurent des taches noires et sujets qui alertent et marquent non seulement les Marocains mais également les observateurs et les touristes visiteurs et hôtes du Maroc. Situation qui n’avait rime ni raison.
Avant de nous plonger dans le vif de notre sujet concernant le Maroc, il est fondamentale de rappeler quelques évidences autour de la criminalité et ses conséquences sur l’ordre public. Rappelons ici que ce modeste article, qui relève d’une esquisse, a pour vocation de mettre en exergue ce fléau qui s’invite, par le poids de ses effets, dans l’actualité et qui devint, in fine, un phénomène social voire sociétale. Par ailleurs, ce sujet doit devenir une véritable source d’inquiétude pour l’opinion publique et imposer un niveau de traitement très élevé de la part des pouvoirs publics. En effet, les chiffres, les faits divers, les tribunaux, le sentiment d’insécurité…Autant d’indicateurs sui laisse penser que ça devient, fatalement, un trait de caractère de la société marocaines Malheureusement !
Sans conteste, la criminalité a de graves conséquences sur l’ordre public. Nous pouvons dresser ci-dessous une liste non-exhaustive de ses exemples de conséquences :
1. La peur et l’insécurité : Lorsque les gens sont victimes de la criminalité ou qu’ils en sont témoins, cela peut créer de la peur et de l’insécurité dans la société et chez les individus. Ça peut devenir source d’angoisse et de peur injustement installée. Également, les gens peuvent se sentir impuissants et avoir peur de sortir de chez eux, ce qui peut affecter leur qualité de vie. Malheureusement, au Maroc, on ne dispose pas d’études ni d’évaluations ni de rapports à la fois publiques ou universitaires ou associatives de ces sujets liés à la qualité de vie !
2. La perte de confiance dans les autorités : Si la criminalité est perçue comme étant hors de contrôle, les gens peuvent perdre confiance dans les autorités et dans leur capacité à maintenir l’ordre public. Cela peut conduire à une augmentation du sentiment d’injustice et de l’exaspération envers les forces de l’ordre. En effet, les marocains sont très septiques au sujet du maintien de l’ordre et surtout les opérations permanentes efficaces et visibles. La criminalité foisonne et la justice fais moins peur aux auteurs d’agressions.
3. La tension sociale : La criminalité peut également créer de la tension sociale entre les différents groupes de la société. Des groupes peuvent être stigmatisés ou accusés à tort, ce qui peut conduire à des tensions et des conflits entre les différents groupes. Des lors que la criminalité devient monnaie courante dans la société ,il n’est pas étonnant de voir fuser des tensions sociales que l’on peut éviter voire régler par d’autres moyens beaucoup plus pacifiques. Des tensions qui traversent toutes les rouages de la société. Dans les transports en commun, dans les lieux de travail, dans les familles, aux collèges, aux lycées, à l’université, dans les lieux de repos, dans les stades de foot etc. Cette tension sociale touche également les différentes composantes sociologiques du pays.
4. La baisse de l’activité économique : La criminalité peut également affecter l’activité économique d’une région. Les entreprises peuvent être dissuadées de s’implanter dans des régions où la criminalité est élevée, ce qui peut affecter l’emploi et le développement économique. En effet, une région qui n’est pas certaine fait faire et dissuade l’investisseur. Un pays traversé par les agressions
et par les différents types de criminalité n’est pas convoité par les détenteurs de capitaux. Par conséquent, au lieu d’avoir une économie ou une activité commerciale saine on aura une toile économique et commerciale articulée autour des trafics de drogues, prostitution, extorsion, crimes financiers, faux-monnayage, terrorisme etc.
5. L’augmentation des coûts pour la société : La criminalité peut également entraîner des coûts élevés pour la société en termes de justice pénale, de soins médicaux et de réadaptation. Ces coûts peuvent être supportés par les contribuables, ce qui peut affecter leur qualité de vie. Ce derniers point est très important et doit être pris au sérieux car si la criminalité augmente les accidents augmentent, les procès augmentent, le budget de l’État alloué à ces secteurs augmente proportionnellement.
En résumé, la criminalité peut avoir de graves conséquences sur l’ordre public, affectant la qualité de vie des individus, la confiance dans les autorités, les relations sociales, l’activité économique et les coûts pour la société. Il est donc essentiel de travailler à la prévention et à la réduction de la criminalité pour maintenir l’ordre public.
Le cas du Maroc…
Le Maroc, ce pays d’Afrique du Nord, est confronté à des défis en matière de sécurité et de criminalité. Bien que le pays ait fait des progrès significatifs dans la lutte contre la criminalité, il reste encore du travail à faire pour assurer la sécurité des citoyens et des visiteurs. Dans cet article, nous allons examiner les dernières statistiques sur la criminalité au Maroc et explorer certaines solutions potentielles pour lutter contre ce problème.
Chiffres clés sur la criminalité au Maroc
Chaque année le ministère public engage plus de 16.000 poursuites judiciaires pour des crimes commis sous la menace d’armes blanches. C’est trop, et c’est un fléau auquel il s’agit de mettre fin. C’est d’ailleurs l’objet d’une circulaire adressée, le 30 décembre dernier, par le Parquet général aux procureurs du roi près les différents Cours d’appel et tribunaux de première instance du Royaume*.
En 2022, les affaires criminelles enregistrées ont connu une baisse de 30,22%, pour un total de 820.274 affaires, permettant de repérer et de déférer 875.879 individus devant les différents parquets. Seulement 6,59% de ces affaires sont des crimes à caractère violent.**
Selon le Rapport 2021 sur la criminalité et la sécurité au Maroc publié par le Haut-commissariat au Plan, voici quelques-uns des chiffres clés concernant la criminalité dans le pays:
1.Nombre total d’infractions enregistrées : En 2020, 395 724 infractions ont été enregistrées au Maroc, soit une légère diminution par rapport à 2019, où 397 384 infractions avaient été enregistrées.
2. Taux de criminalité: Le taux de criminalité au Maroc est de 1 086 infractions pour 100 000 habitants en 2020, soit une légère baisse par rapport à 2019 (1 095 infractions pour 100 000 habitants).
3. Répartition des infractions : Les infractions sont réparties comme suit : 68,4% sont des délits contre les biens (vols, cambriolages, etc.), 25,5% sont des délits contre les personnes (violences, agressions, etc.) et 6,1% sont des délits liés aux stupéfiants.
4. Agressions sexuelles : En 2022, plus 2182 agressions sexuelles ont été enregistrées, soit une augmentation de 2,3% par rapport à 2021 ( ces chiffres sont ceux déclarés, sinon la réalité liée au silence des victimes dépasse largement ces seuils)
5. Homicides : Les homicides ont légèrement diminué en 2020, avec 669 cas enregistrés, contre 674 en 2019.
Solutions pour lutter contre la criminalité au Maroc
1. Renforcement des capacités des forces de l’ordre: Le gouvernement doit investir dans la formation et l’équipement des forces de l’ordre, notamment en mettant en place des programmes de formation continue et en améliorant les équipements et les technologies à leur disposition.
2. Amélioration de la prévention et de la réhabilitation: Les programmes de prévention de la criminalité, tels que l’éducation, la sensibilisation et le soutien aux familles en difficulté, doivent être renforcés. Les programmes de réhabilitation pour les délinquants, tels que les services de probation et les centres de réinsertion, doivent également être développés et améliorés.
3. Promotion de l’éducation et de l’emploi des jeunes: La lutte contre la criminalité doit également passer par la création d’opportunités économiques pour les jeunes, notamment l’amélioration de l’accès à l’éducation et la création d’emplois.
4. Collaboration entre les autorités et la société civile: Le gouvernement doit encourager la collaboration entre les autorités et les organisations de la société civile pour renforcer les efforts de lutte contre la criminalité. Cela peut inclure la création de forums de dialogue et de partenariats, ainsi que le soutien aux initiatives communautaires de prévention de la criminalité.
5. Lutte contre la corruption : La corruption est un facteur qui contribue à la criminalité. Le gouvernement doit prendre des mesures pour lutter contre la corruption, renforcer la transparence et améliorer la confiance du public dans les institutions.
En somme, la lutte contre la criminalité au Maroc requiert des efforts concertés et coordonnés de la part du gouvernement, des forces de l’ordre, de la société civile et de la population. En mettant en œuvre ces solutions, le Maroc peut progressivement réduire la criminalité et garantir un avenir plus sûr pour tous. Il faut mentionner également que la criminalité et sa fréquence au Maroc a engendré chez les marocains une psychose qui touche tout le monde. Sans oublier l’impact psychologique sur les enfants et la jeunesse qui naturalise avec une violence ambiante. C’est le vrai chantier au Maroc et ça doit être une cause nationale. Enfin, certains rapports comparent le Maroc à l’Irak, Afghanistan, Afrique du Sud… C’est une question d’autorité publique et dissuasion avant tout.
Brahim Charafi
Chercheur Universitaire, Paris.
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