La femme dans les sociétés africaines : les conclusions de l'étude … – Le Matin
Une participation paritaire des femmes à l’emploi pourrait générer jusqu’à 40% de croissance du PIB au Maroc. C’est ce qui ressort d’un rapport publié par Boston Consulting Group (BCG). Ce document, qui met en lumière les perceptions différentes du rôle des femmes dans les sociétés africaines, révèle qu’une vague de défis macro-économiques, suivie par la pandémie de la Covid-19, a entraîné depuis 2016 une régression de la participation économique des femmes en Afrique. «Entre 2010 et 2016, l’Afrique a réduit les inégalités entre les hommes et les femmes plus rapidement que n’importe quelle autre région du monde. En 2016, cette cadence a ralenti en raison d’une crise des matières premières, suivie d’une récession mondiale et de l’apparition de la pandémie. Alors que le monde renoue avec la normalité post-Covid-19, le continent africain doit intensifier ses efforts pour réduire les disparités entre les hommes et les femmes», indique le rapport.
Dans un commentaire sur le rapport, Zineb Sqalli, Managing Director & Partner de BCG à Casablanca, souligne que si la participation économique des femmes africaines retrouvait le rythme observé entre 2010 et 2016, le continent pourrait venir à bout des disparités hommes-femmes 60 ans plus tôt que le laisse présager le rythme actuel.
Le rapport souligne, par ailleurs, qu’au niveau continental, le ratio de parité hommes-femmes en Afrique est aujourd'hui semblable à la moyenne mondiale. «Selon le “Gender Gap Report 2022” publié par le World Economic Forum (WEF), le score africain est de 0,69 et la moyenne mondiale est de 0,71. Cependant, on observe une grande disparité en matière de parité à travers le continent. Sur les 146 pays inclus dans le rapport du WEF, le Rwanda se classe 6e, la Namibie 8e et l’Afrique du Sud 20e, alors que la moitié des 50 derniers pays du classement mondial sont africains, y compris le Nigeria 123e, le Maroc 136e et le Congo 144e».
L’analyse réalisée par BCG portant sur le niveau d’éducation et la participation économique des femmes africaines a révélé qu’au cours des 20 dernières années, des pays comme le Maroc et l’Égypte ont considérablement amélioré l’accès à l’enseignement primaire et secondaire pour les filles. Pourtant, les femmes demeurent largement en dehors du marché du travail et le principal obstacle semble résider dans des croyances profondément ancrées concernant le rôle des femmes au sein de la société, autant auprès des hommes que des femmes. «Environ la moitié des personnes interrogées au Maroc et en Égypte, hommes et femmes confondus, ont déclaré que les femmes ne devraient pas travailler si le mari ou le père gagne suffisamment d’argent pour subvenir aux besoins du ménage. A contrario, seuls 12% des femmes et 15% des hommes en Afrique subsaharienne sont de cet avis», révèle l’étude. Et d’ajouter que «près de 90% des hommes interrogés dans ce segment ont déclaré que les femmes devraient aller à l’école pour être instruites et respectées, et non pour être financièrement indépendantes ; et 39% des femmes pensent que l’éducation supérieure est plus importante pour les hommes que pour les femmes. Une participante à l’étude à Casablanca a même déclaré que le modèle de réussite pour une femme marocaine est d’être une femme dont les enfants (mâles) réussissent».
L’étude montre, en outre, que ces pays disposent d’un vivier de femmes éduquées, mais leurs économies n’en tirent pas suffisamment profit en raison de ce narratif, en cause dans leur faible participation au marché du travail. On rappelle également que le Maroc enregistre le 8e plus faible (139e/146 pays) taux de participation des femmes à l’économie dans le monde, estimé à 20%. «Pour y remédier, les femmes doivent être valorisées en tant qu’agents économiques, capables de générer de la valeur pour leurs entreprises, communautés et pays, au-delà de leurs rôles d’éducatrices et de mères», recommandent les auteurs de l’étude.
Par ailleurs, le rapport souligne que la violence et l’insécurité sont omniprésentes et touchent les femmes de tous âges, de tous niveaux de revenus et de tous niveaux d’éducation dans tous les pays du continent. Si la violence domestique est extrêmement prédominante en Afrique subsaharienne, dans les pays de l’Afrique du Nord la violence revêt une autre forme, celle de l’insécurité dans l’espace public, citée comme la deuxième plus grande difficulté, après l’accès à l’emploi. En effet, 36% des femmes au Maroc et 33% des femmes en Égypte disent que la sécurité dans les endroits publics est le principal défi auquel elles sont confrontées.
Pour rappel, l’étude BCG intitulée «African Women’s Voices: Reframing the Narrative on Women’s Roles in African Societies» se base sur une enquête menée auprès de 6.000 femmes et hommes Au Maroc, en Afrique du Sud, en Égypte, en Éthiopie, au Kenya et au Nigeria (représentant 60% du PIB du continent).
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